Faut pas nous prendre pour des bacs à douche !

2005-05-10 MAR 00:00 (FR) | STEVE

Je ne vais pas vous conter l’ascension réussie récemment du Huayna Potosi (6088 m tout de même).

Je vais simplement, comme je le fais depuis plus de 10 mois, vous parler de ces pays, de ces rencontres, de ces regards, de ces réalités que je croise et tente de comprendre, que je reçois et tente de ne pas oublier ; Parce que la réalité d’ici peut aider à mieux voir là-bas vers chez vous...

Il y a du monde dans la salle

Ce 5 mai au matin je m’engouffre dans la salle de conférence de la Chambre minière de Potosi, Bolivie. Peu à peu les gens arrivent jusqu’à remplir les 250 places. Toute la diversité de la population de la région de Potosi est là. Femmes et hommes de la ville et de la campagne. Facile de faire la différence. Ceux de la ville se protègent du froid automnal dans de grands manteaux ou veste de cuir ; vêtements de ville.... Ceux de la campagne sont arrivés ensemble, une banderole devant eux accompagnée du winphala, drapeau des communautés indiennes-originaires Quechua. Ils portent chacun ces vêtements multicolores traditionnels reflétant leur appartenance à tel village, telle communauté. Poncho vert, rouge, mauve, avec des tissages colorés et riches de motifs ; des chapeaux en cuir, ronds, des bonnets bleu et rose sur fonds blanc. Toute la multiculturalité de la population locale est là venant parfois de très loin. L’événement doit être d’importance.

La conférence commence introduite par un sénateur. En cette matinée, les politiques, autorités des communautés indiennes, responsables d’associations ou simples citoyens sont venus écouter une brochette de parlementaires présenter ici comme dans chacune des capitales régionales un projet de loi. Ces parlementaires eux vont dans tout le pays écouter les remarques, objections, propositions de modifications de la population. Chacun peut prendre la parole en espagnol ou en quechua durant cinq minutes.... Quel est cet engouement démocratique participatif qui réunit les foules ?

Ce forum citoyen a pour but de présenter le projet de loi convoquant l’assemblée constituante. La Bolivie a décidé de se doter d’une nouvelle constitution ; pas du genre de celle que l’on tricote dans le dos des citoyens, non là on utilise ce long processus que l’on nomme démocratie, en convoquant une assemblée constituante. Mais pour cela il faut définir comment la convoquer cette assemblée et qui en fera partie ; Alors on élabore un projet de loi. Mais dans un soucis de prendre en compte la volonté populaire et s’assurer de la participation de 60% de la population indienne du pays alors les parlementaires traversent le pays pour présenter le projet de loi et proposer deux options de composition d’assemblée constituante...Et je peux vous dire que ça a discuté, écouté et respecté la parole de l’autre.

En 2006, 180 (sans doute) citoyens boliviens élus et émanant de la société civile se réuniront pour un an, afin d’écrire la nouvelle constitution qui sera ensuite approuvée. Un beau travail de consensus à s’asseoir à 180 avec toutes ses différences et écrire un texte, une constitution.

Alors, durant ces 5 heures de discussions je pense à nous là-bas en Europe, dans ce beau continent des Lumières, dans cette France fière et célèbre pour sa déclaration des droits de l’homme. Je pense à cette constitution pour laquelle on est appelé à s’exprimer le 29 mai prochain. Une des plus belles négations de démocratie que je connaisse. Là, les Boliviens ils nous infligent une leçon de maître. Le 29 mai prochain, nous avons la chance de pouvoir, pour la première fois, nous exprimer sur l’Europe. Un référendum, une consultation ou le peuple décide de son avenir, nous offre cette possibilité de nous exprimer ; Hors, on nous propose un texte, à dix milliards de lieux de ce que l’on peut attendre d’une constitution puisqu’il a tout d’un traité et a été élaboré dans un beau refus de la démocratie (politiques non élus par le peuple et je ne parle pas du scandale des frais d’hôtel de Giscard).

Bien entendu, je ne vais pas faire campagne pour le oui. Je refuse que s’enferme notre avenir dans un texte constitutionnel néo-libéral dont l’adoption constituerait un obstacle majeur pour la construction d’une Europe à laquelle je crois, à laquelle je suis attaché, moi, un simple européen sur les routes de l’Amérique du sud.

Quelle constitution ?

Alors au regard de l’expérience bolivienne. Je crois halluciner ! Première raison : on nous appelle à nous prononcer sur un texte complexe, quasiment illisible, de près de 400 pages hors annexes, 800 pages avec annexes. Aucune Constitution au monde n’est aussi abominable, elles font toutes entre une dizaine de pages et 20 ou 30 pages.

L’insoutenable complexité de ce texte est étroitement liée au fait qu’il vise à définir en même temps un cadre de prise de décisions publiques (objet d’une Constitution) et un type particulier de politique : le libéralisme économique et financier. En résumé, faire avaliser rétrospectivement, en une seule fois, en leur donnant un statut constitutionnel le plus irréversible possible, toutes les politiques libérales en vigueur, telles que reprises dans la partie III du projet de constitution, tout en évitant soigneusement d’en parler.

Pourquoi d’après vous le Parlement européen diffuse-t-il gratuitement un mini-livre de poche officiel " Une constitution pour l’Europe " (février 2005, éditions Dalloz) dans lequel on trouve le texte intégral... sauf la partie III ?

Comme l’histoire nous le prouve et l’exemple bolivien l’illustre, les principes fondamentaux du droit constitutionnel, conçus pour protéger les citoyens, sont malmenés.

— 1. Une Constitution doit être lisible pour permettre un vote populaire : ce texte-là est illisible.
— 2. Une Constitution n’impose pas une politique ou une autre : ce texte-là est partisan.
— 3. Une Constitution est révisable : ce texte-là est verrouillé par une exigence de double unanimité.
— 4. Une Constitution protège de la tyrannie par la séparation des pouvoirs et par le contrôle des pouvoirs : ce texte-là n’organise pas un vrai contrôle des pouvoirs ni une réelle séparation des pouvoirs.
— 5. Une Constitution n’est pas octroyée par les puissants, elle est établie par le peuple lui-même, précisément pour se protéger de l’arbitraire des puissants, à travers une assemblée constituante, indépendante, élue pour ça et révoquée après : ce texte-là entérine des institutions européennes qui ont été écrites depuis cinquante ans par les hommes au pouvoir, à la fois juges et parties.

Boliviens, venez au secours de l’Europe ! ! !

Alors félicitons-nous car au moins on nous demande notre avis par référendum, ce n’est pas le cas partout en Europe. C’est simple un référendum, la réponse c’est OUI ou NON. Quand le président convoque la population à s’exprimer il le sait, il sait qu’on pourra dire OUI ou alors NON et que cela aura des conséquences quel que soit le résultat. Et puis j’écoute la campagne, je lis les journaux en ligne, etc. et on a l’air de me dire que seule la victoire du OUI a été envisagée. Quand j’entends Chirac dire sur France 2 « Est-ce que vous croyez vraiment que c’est sérieux de dire qu’il existe un plan B. ? Il n’y a pas l’ombre d’une chance, ce n’est pas envisageable. La renégociation, ça n’existe pas. J’entends dire "il y a un plan B". Il n’y a pas de plan B, naturellement. » Et ceux qui disent le contraire sont de « mauvaise foi ».

Alors soit on nous prend pour des bacs à douche soit pour des râpes à carottes !

Ils ont pas prévu une victoire du non, ils ont dû oublier ce qu’était la démocratie. Ils veulent créer une terreur en faisant croire que seule la victoire du OUI permet un avenir serein et que le NON majoritaire, c’est le chaos, les ténèbres et j’en passe. Et si on leur rappellait, pour la forme ce que c’est la démocratie ?


Ni droite ni gauche ?

Un échiquier politique illisible, des OUI à droite, gauche, verts et des NON à droite, gauche, verts. Alors si on ne votait pas en aveugle en faisant confiance à ses ténors de la politiques favoris, si on ouvrait le texte et que on se faisait son propre avis ? C’est compliqué ? ben oui mais c’est notre avenir, celui de nos enfants, celui de nos voisins d’Europe, du monde qui est en jeu. Alors ce soir on zappe Ardisson et on se penche après un petit grog sur ce texte.

Il y a un truc qui saute aux yeux, les articles " sociaux " sont en général non contraignants, les articles " néo-libéraux " sont contraignants. Ca veut déjà dire quelque chose sur le type d’Europe que on nous propose. Une constitution qui préserve les acquis sociaux, j’ai du mal à voir comment.

Article II - 94 : "l’Union reconnaît et respecte le droit d’accès aux prestations de sécurité sociale et aux services sociaux...". Explications dans la déclaration 12 : "La référence à des services sociaux vise les cas dans lesquels de tels services ont été instaurés pour assurer certaines prestations, mais n’implique aucunement que de tels services doivent être créés quand il n’en existe pas". Nous voilà prévenus. Aucun droit européen n’existe donc face à ce beau principe. Les peuples d’Europe ont " droit " à des services sociaux... sauf s’il n’en existe pas ! Que penser de tels " droits fondamentaux " ?

Il suffit de regarder ce qu’ici, en Argentine, au Chili, au Paraguay ou en Bolivie, les injonctions du FMI et de la Banque Mondiale pour un désengagement de l’Etat et des privatisations à tout va, a abouti. Système de santé privatisé avec cliniques pour riche et dispensaires populaires pour les pauvres où il faut faire des heures d’attentes avant de passer en coup de vent devant un médecin disposant de bonne volonté à défaut d’équipement.

Je vais juste, encore, vous raconter quelques exemples, des rencontres marquantes le long de ma route.

A Sucre, en Bolivie, je me pose sur un banc de la place principale. Vient, Roberto, s’asseoir à côté de moi. On parle une demi-heure du temps, des récoltes, de la mine de Potosí où travaillait son père. Je constate qu’il cache sa main droite sous sa veste. Sa main gauche est bien écorchée et de belles entailles cicatrisent difficilement.

A un moment, gêné, il me raconte ce qui le conduit à errer dans les rues de Sucre, plutôt que rentrer à son village de Betanzos, où seul, sans famille, il survit en cultivant un petit lopin de terre, dont il n’a pas les actes de propriété et élève quelques poules.

Il y a 20 jours, le camion qui le menait à Sucre a eu un accident. Il a eu les deux mains broyées. N’ayant pas de sécurité sociale (ça n’existe pas), ni de système d’aides médicales comme les employés de l’Etat, il n’a pu soigner ses blessures. Seul, sa main gauche a fini par fermer les blessures et aujourd’hui il peut bouger légèrement les doigts. Il me montre alors sa main droite. Il s’agit d’une multitude de blessures avec un doigt bien cinq fois plus gros que de coutume, infesté de pue, etc. Il reste encore une chance de sauver sa main. Pour cela il faut vite opérer car 20 jours sans traitements le place près de l`amputation pour éviter la gangrène.

Après quelque temps de recherche nous trouvons un étudiant en médecine qui se propose de l’opérer gratuitement mais ne peut lui fournir les médicaments nécessaires à l’intervention et aux soins post opératoires. Sans système de soin, ce paysan, sans ressources, sans famille sur qui compter, était condamné à perdre l’usage de sa main droite. Un paysan handicapé. Quel avenir s’ouvrait à lui ? La mendicité.


L’Europe, c’est le paradis ! ! !

Quand on pense à l’Amérique du sud, on pense à ces belles images des Andes, de l’Amazonie.... Et si on se met à penser à la situation politique, économique, quelles images viennent ? Des pays en voie de développement, des pays instables (Equateur, Bolivie, etc.), des pays en proie à la corruption, aux trafics. Des pays producteurs de drogue (Colombie, Bolivie) .

On se dit qu’il a encore beaucoup à faire pour qu’ils atteignent le degré de sérieux de nos économies, de nos systèmes politiques. C’est vrai, la Colombie et la Bolivie produisent de la drogue.... Mais qui consomme ? Les pays occidentaux. Pourtant les E.U et l’Europe dépensent des millions pour tenter de réorienter l’agriculture des zones de production ou pour lutter contre les narcotrafiquants. Pauvre Amérique du sud, terre de trafics illégaux, de mafias, de marché noir, etc.

Alors on peut être fier de ce que nous sommes devenus, en Europe, des pays qui pour la santé de leur population, de leur économie ont établi des règles, des lois, des polices.

Et puis je lis l’article IV - 440-6 du projet de Constitution Européenne. Il est beau cet article, pas clair comme pour cacher son contenu. Le voilà : " Le présent traité ne s’applique aux îles anglo-normandes et à l’île de Man que dans la mesure nécessaire pour assurer l’application du régime prévu pour ces îles à l’origine par le traité visé à l’article IV-437, paragraphe 2, point a et qui a été repris au titre II section 3 du protocole relatif au traité, etc ". J’arrête. Avez-vous compris ? Non, c’est normal, un grand nombre d’articles de ce texte ne sont pas faits pour être compris ! Vous avez une idée ? Ben oui c’est ça !

Les paradis fiscaux que sont Jersey et l’île de Man seront épargnés. C’est, après tout, l’un des droits fondamentaux du capital que d’échapper aux tracasseries fiscales. Une autre partie du même article est plus limpide : " Le présent traité ne s’applique pas aux îles Féroé ". C’est un archipel sous souveraineté danoise, et c’est un énorme paradis fiscal.

Partisans du oui ou de non, bons pères et bonnes mères de famille, dites-moi, c’est pas un scandale ça ?

Ce texte va constitutionnaliser les paradis fiscaux, ces lieux ou les banques ont leur siège ou succursales et peuvent effectuer des transferts d’argents sans qu’aucun Etat, juge ou police ne puisse vérifier l’origine des fonds et leurs destinations. Alors le petit paysan de Colombie qui voit débarquer les G.I etatsuniens pour détruire son champ de coca à coup de lance à incendie, c’est lui le coupable aux désordres du monde, tout comme la gamine arrachée à sa famille dans une favela de Rio pour finir sur les trottoirs de Paris.

Accepter ce traité constitutionnel c’est accepter que sur le territoire européen des plaques financières continuent à blanchir les trafics de drogue, de femmes, d’enfants ; c’est accepter que l’hypocrisie des grands discours contre le terrorisme cache l’acceptation de leur financement sur nos terres, dans cette belle Europe que nous appelons tous de nos vœux.


Si tu votes OUI, pour l’Europe, Ca roule ! ! ! !

Des centaines d’heures , des milliers peut-être, de bus, pour en arriver là, à cette série de boucles sur le continent sud américain et à présent traîner mon sac à dos sur les routes de Bolivie.

Partout sur mon chemin ces ruines de gares, ces voies de chemin de fer désaffectées. Œuvres immenses initiées au début du 20e siècle, les axes ferroviaires ont désenclavé des territoires immenses (la Patagonie, le Pantanal brésilien), ont permis à des régions isolées d’exporter leurs produits (région andine argentine, hauts plateaux péruviens et boliviens). Le chemin de fer a fait naître des villes, a offert la mobilité à ceux qui ne se déplaçaient qu’à dos d’ânes.

Au début des années 90, les gouvernements néo-libéraux boliviens, argentins, brésiliens, paraguayen, ont désengagé l’Etat de ces infrastructures, du service public du transport des hommes ou des marchandises. Les lignes de chemin de fer ont fermé les unes après les autres, ou ont été privatisées. Des villages ont plongé dans l’oubli ; loin de tous. Comme Angustura, en Argentine, village fantôme que j’ai traversé, gros bourg du commerce local jusqu’en 1993, lorsque Menem a privatisé le réseau argentin et impliqué la fermeture de toutes les lignes inter-régionales... sauf une. A Tucuman, les voyageurs peuvent toujours rejoindre Buenos Aires par le train ; Plus long que le bus vu les multiples arrêts (c’est aussi ça le service public) et la vétusté du réseau (aucun investissement), ce transport est moitié moins cher que le bus. Dans tout ces pays, se déplacer veut dire prendre l’un de ces bus de 50 passagers d’une compagnie privée ; Vive la concurrence, à faire le tour des gares routières on voit vite qu’elles ont toutes aligné leurs tarifs ; et à des coûts important pour le pouvoir d’achat local. Ces bus, ils sont partout sur les routes ; pourtant les habitants de ces pays ne voyagent pas ou très peu pour faire du tourisme ; luxe pour les couches aisées ou les étrangers en voyage. Idem, les marchandises que chacun consomme sont transportées d’une région à l’autre en camion. Des hordes de camions partout sur les routes.

Alors je me demande ce que cette situation qui date de 10 ou 15 ans va devenir lorsque ces pays vont atteindre le niveau de développement de l’Europe ; lorsque les Traités de Libre Commerce, les traités d’exportations permettront à ces pays d’acheminer dans le monde entier leurs productions, ou tout simplement quand ces pays auront atteint notre niveau de consommation (ils ont bien le droit non ? ? ?) Par exemple, on évalue que à un niveau de vie états-unien, les chinois nécessiteraient de mettre en circulation 700 millions de véhicules....Ca fait peur ! ! !

Et nous, on en est ou ?, que nous propose le Traité constitutionnel, en matière de transports. En fait il reprend le contenu des traités antérieurs (articles III-236 à III-245) et n’introduit donc pas de rupture avec la construction néo-libérale en cours. Il lui donne symboliquement, mais c’est énorme, une valeur " constitutionnelle ". Cela consiste, selon une logique inavouée mais claire, à généraliser le dumping social dans tous les modes de transport, afin d’en contenir les tarifs.

Le modèle sous-jacent est celui des transports maritimes qui, ces trente dernières années, ont enregistré mondialement une progression de trafic de 430 % et une baisse des coûts de 30 %, essentiellement par le recours aux " navires poubelles " et à la baisse des revenus des marins. Les bilans des récentes " marées noires " de l’Erika et du Prestige se passent de commentaire à cet égard.

Et là l’hypocrisie est belle. Vous avez tous entendue parler que la France et ses partenaires européens ont ratifié le Protocole de Kyoto sur la limitation de l’émanation de gaz à effet de serre ; vous vous souvenez du discours écolo de Chirac à Johannesburg « la maison brûle et nous regardons ailleurs » sur nos irresponsabilités de pays riches face au désastre environnemental.

Il y a en effet la politique européenne des transports affichée par la Commission sur son site Internet et dans ses diverses publications, farci d’incantations au développement durable et au report de trafic routier vers le rail... Et puis il y a sa politique réellement existante, celle que le Traité constitutionnel va permettre de poursuivre et qui a pour conséquence la baisse du transport ferroviaire et l’explosion du transport routier, environ 5 fois plus gourmand en énergie et 10 fois plus polluant pour l’atmosphère, pour un déplacement donné.

Mais la régulation sociale défaillante du secteur routier est très prisée des " forces du marché ", ainsi que celle du secteur aérien, où la Commission soutient le développement des compagnies dites " low cost " (à bas coûts) alors que le recours à l’avion pour de courts trajets intérieurs constitue une aberration énergétique et environnementale.

L’augmentation des trafics routiers a ainsi été supérieure à 20 % pour les voyageurs et à 30 % pour les marchandises entre 1990 et 2001, faisant plus qu’annuler les progrès réalisés sur les moteurs des véhicules en termes de consommation et d’émissions de gaz carbonique (CO2). Consécutivement, les rejets de gaz à effet de serre (GES) des transports en Europe ont augmenté de près de 25 % durant cette période et représentent désormais 28% du total, dont 84% sont dus au transport routier.

C’est compliqué ? peut-être, mais c’est notre vie de tous les jours qui est en jeu. Notre sécurité sur les routes, l’air que nous respirons et celui que respirerons nos enfants, et l’égalité sociale...

En réalité, l’accroissement des déplacements de marchandises n’est pas un fait inéluctable, mais une caractéristique du néolibéralisme. Il s’agit de l’un des piliers sur lesquels reposent les gains de productivité des dernières décennies dans l’industrie et la grande distribution. C’est en effet au prix de la circulation d’un flux ininterrompu de poids lourds que la gestion en " flux tendu " permet aux entreprises d’économiser sur la gestion de leurs stocks, ou bien de délocaliser différents maillons de leurs chaînes de production afin de réduire leurs charges sociales, fiscales ou environnementales.

Allez, un petit exemple marrant, enfin si on veut. En 1993, un rapport de l’Institut allemand de Wuppertal avait montré que les différents ingrédients nécessaires à la fabrication d’un simple pot de yaourt aux fraises parcouraient un cumul de 3 500 kilomètres avant d’être réunis. Alors, ainsi le coût du pot de yaourt est faible car le marché ne prend pas en compte les coûts humains et environnementaux de tels choix (effets dits " externes "). Pourtant ces frais représentent un coût pour la collectivité équivalent à 7,3% du PIB européen, soit du même ordre de grandeur que la contribution des transports au PIB (10%). Ce coût a augmenté de 23% depuis 1995 sous l’effet de la croissance des volumes transportés par la route et l’avion, car la route est à elle seule responsable de 84% de ces coûts, le transport aérien de 14% et le rail de 2%. (sources INFRAS (Zürich) et IWW (Université de Karlsruhe) présentée le 6 octobre 2004 à la Commission et au Parlement européen).

Une façon efficace d’enrayer l’explosion du trafic des poids lourds en Europe tout en assurant de meilleures conditions aux chauffeurs consisterait à harmoniser par le haut la législation sociale dans ce secteur. D’une part, de telles dispositions supprimeraient les avantages actuellement conférés aux Etats les moins-disants socialement et, d’autre part, le renchérissement corrélatif des transports inciterait à limiter les déplacements inutiles. (le salaire minimum est 6 fois inférieur en Pologne qu’en France et rien n’empêche les camionneurs polonais d’exercer sur tout le territoire européen...alors...)

L’article III-210 (paragraphe 2, point a) du Traité constitutionnel, relatif à la politique sociale dans l’Union, résout radicalement la question : l’harmonisation sociale est interdite. Les politiques d’emploi, envisagées sous l’angle d’une "économie de marché où la concurrence est libre et non faussée" (I-3 : les objectifs de l’Union) instituent précarité et flexibilité. L’article II-203, par exemple, exhorte les États membres à "promouvoir une main d’œuvre (...) susceptible de s’adapter ainsi que des marchés du travail aptes à réagir rapidement à l’évolution de l’économie".

Contrats précaires et temps partiels imposés seront donc généralisés. Les femmes seront les premières concernées puisqu’elles représentent déjà 80% des postes à temps partiel en France.

Les écarts de législation sociale entre Etats de l’Union constituent en réalité autant de distorsions de concurrence, que le Traité constitutionnel n’envisage de supprimer qu’en nivelant par le bas les garanties sociales des travailleurs des transports. Tel est le sens unique du chemin vers la " concurrence libre et non faussée " si chère à ce Traité.

Felix et son gros camion

A lire cela, je pense à ce camionneur, Felix, qui nous a pris en stop sur l’Altiplano bolivien, quelque part vers le Sajama. Sa famille vit vers Cochabamba. Il ne la voit jamais ou presque ; aucun droit, aucune assurance ne le protège. Pour gagner sa vie, il doit aligner les kilomètres entre Arica au Chili, la Bolivie, l’Argentine ou le Paraguay ; S’il négocie trop haut sa prestation transport, un autre camionneur, plus désargentés lui piquera le chargement.

Alors, comme ces routiers polonais ou lituaniens que l’on voit depuis peu sur les routes d’Europe, faisant la liaison Rotterdam / Gênes, ou autre, Felix est le maillon d’un système qui a besoin d’absences de garanties sociales pour les salariés qui font tourner l’Europe....


C’est écrit dans les livres

La démocratie est née à Athènes, en Grèce, en Europe, on a tous appris cela à l’école. Dans le même chapitre il devait y avoir une allusion à la révolution française, à l’Europe de Lumières, à ces périodes fastes pour les idées, que tout au long de mon chemin, on n’arrête pas de me rappeler ; Et oui, elle est belle cette France des Rousseau, Diderot ou Voltaire.

Le quatrième larron, Montesquieu, dans l’Esprit des lois, il a sans doute décrit la meilleure idée de toute l’histoire de l’Humanité : tous les pouvoirs tendent naturellement, mécaniquement, à l’abus de pouvoir. Il est donc essentiel, pour protéger les humains contre la tyrannie, d’abord de séparer les pouvoirs, et ensuite d’organiser le contrôle des pouvoirs : pas de confusion des pouvoirs, et pas de pouvoir sans contre-pouvoirs.

Ainsi le peuple dit : « Toi, le Parlement, tu fais les lois, mais tu ne les exécutes pas. Et toi, le Gouvernement, tu exécutes les lois, mais tu ne peux pas les écrire toi-même. » Ainsi, aucun pouvoir n’a, à lui seul, les moyens d’imposer sa volonté.

Bon, je ne vais pas faire un cours de droit constitutionnel, je n’en ai pas les compétences. Juste revenir sur ces mensonges qui courent les rues ces temps-ci.

Rapidement, car ça commence à faire long, vous savez que la Commission Européenne n’est pas élue au suffrage universel. Pourtant, elle a pour fonction d’élaborer les propositions de loi, de surveiller l’application du droit de l’Union, d’exécuter le budget, de coordonner la politique de l’Union et de représenter l’UE sur la scène internationale.

Et pourtant, on peut s’inquiéter à voir comment la Commission est perméable au milieu des affaires et aux différents groupes patronaux. Pour exemple en matière d’indépendance, les liens étroits entre certains commissaires et les cercles puissants tels que la commission Trilatérale ou le Groupe Bilderberg, fondés par David Rockefeller ayant déclaré « quelque chose doit remplacer les gouvernements et le pouvoir privé me semble l’entité adéquate pour le faire » dans Neesweek en février 1999, où les plus puissants hommes d’affaires et décideurs politiques, comme le secrétaire général de l’OTAN , ou le directeur général de l’OMC se côtoient. Prodi , Président de la Commission a été membre de direction du groupe Bilderberg, Pascal Lamy, social-démocrate, commissaire au commerce de la Commission Prodi a participé à leurs réunions en 2001 et 2003.

Face à cette indépendance exemplaire, on constate une absence de contrôle politique de la part notamment des parlementaires voir art. III 340.( Ceux-ci doivent rassembler une double majorité, représentant la moitié des membres de l’assemblée et les deux tiers des suffrages exprimés pour adopter une motion de censure qui conduirait alors à la démission de l’ensemble de la commission.).

Et pour finir là-dessus, rien ne change pour le Parlement, où siègent les représentant du peuple, les parlementaires, les seuls à être élus par nous dans la grande machine Europe : Le Conseil de ministres garde l’exclusivité en matière de fiscalité, protection sociale, politique extérieure et sécurité et SURTOUT seule la Commission peut proposer l’adoption d’un acte législatif. Et, le Parlement européen est le seul au monde à qui une Constitution refuse le droit de " lever l’impôt " : il ne vote pas la partie recettes du budget de l’Union, dont le monopole appartient au Conseil après approbation à l’unanimité des États membres (I-54-3).

Ceux qui croient à une Europe plus solidaire, augmentant nettement son budget pour accroître son effort de redistribution en direction des pays et régions les moins développées et favoriser une convergence par le haut peuvent toujours attendre !


Adieu les services publics !

Au Paraguay, en juillet dernier, en attendant un bus, nous rencontrons avec Marie, une femme et ses enfants. Le plus jeune à quelques semaines. Rapidement elle nous raconte sa vie, d’institutrice, dans une région pauvre et rurale du sud du pays. Elle est institutrice et vit à 4 km de l’école ou elletravaille.Elle y va à pied tous les jours quel que soit le temps, ou en mobylette quand elle a de l’argent pour mettre du gasoil... Elle a normalement le droit à un congé maternité, mais elle gaspillerait tout son argent en allant à Asunción pour faire reconnaître ses droits, elle a donc travaillé jusqu’a 1 semaine avant d’accoucher, et est repartie au travail 15 jours après, avec sa petite fille dans les bras. Ils organisent des fêtes, des loteries dans son école pour payer la construction de la dernière classe et le salaire de 5 de ses collègues qui n’ont pas de solde.

Energie et force d’une femme qui vit, qui se bat parce qu’elle croit en l’éducation malgré un Etat qui a laissé tomber sa responsabilité dans ce domaine en laissant cela entre les mains du secteur privé et en laissant vivoter les dernières écoles publiques, là-bas loin de la ville.

Dans le métro ou à la télévision chilienne se sont l’omniprésence des publicités pour ces universités privées, qui ventent leurs mérites à la façon d’une pub Hollywood chewing-gum... Ca fait peur !

Au Paraguay, impossible d’étudier la médecine en dehors des écoles privées, chères très chères ! L’étudiant que l’on rencontre lui a quitté sa famille, son pays pour aller étudier gratuitement à... Cuba.

L’éducation est un droit pour tous. Si autour de nous, nos parents, nos oncles, tantes, ont fait un pas vers le haut dans la société en comparaison à leurs parents (ascension sociale)...c’est aussi grâce à un système d’Education Nationale, gratuite et la même pour tous. Alors faisons un tour vers ces 800 pages, raisons de ce long, trop long texte (le mien).

La notion de service public est absente du traité. S’y substitue le concept de « services économiques d’intérêt général » (art III - 122). Conformément aux différentes directives adoptées ces dernières années, les SIEG (notamment les transports, l’énergie, la poste, les télécoms) doivent être davantage libéralisés (III - 166 - 2 et III - 148) et l’émergence de services publics européens à travers la coopération des opérateurs historiques est exclue (art III -162). De plus, l’Etat se voit privé du droit de soutenir des entreprises publiques sous peine de fausser la concurrence (art III-166 et III 167).

Rappelons que : l’on soit pour ou contre le libéralisme, cette option économique doit appartenir aux choix de politiques soumis au jeu démocratique du changement de majorité choisie par le peuple, à moins que l’on nie le principe même de la démocratie.

On est beaucoup à vouloir voter NON, souvent pas pour les raisons que les médias dominants racontent. Nous sommes attachés à des droits sociaux et des services publics basés sur des solidarités collectives, seules à même d’assurer l’autonomie de touTEs. Et si le projet de constitution européenne n’apporte pas d’avancée significative en matière de lutte contre les discriminations, il instaure en revanche des principes libéraux qui menacent nos droits sociaux. Des principes, qui eux, s’imposent bien à tous les États membres !

Les services publics, qui deviennent "services d’intérêt économique général", ne figurent ni dans les valeurs ni dans les objectifs de l’Union, contrairement au traité de Nice qui les incluaient dans les "valeurs communes de l’Union". Ceux-ci sont clairement appelés à être progressivement libéralisés : En III.148 « Les Etats membres s’efforcent de procéder à la libéralisation des services au-delà de la mesure qui est obligatoire en vertu de la loi-cadre européenne adoptée en application de l’article III.147, paragraphe 1, si leur situation économique générale et la situation du secteur intéressé le leur permettent. » Cela signifie des services soumis aux lois de la rentabilité.


La déesse Europe était-elle une femme ?

Dans ce long texte, rien de concret sur les droits des femmes : si l’égalité homme-femme est énoncée (article II-83), le droit des femmes à disposer de leur corps n’est pas inscrit. Même si rien ne l’interdit, rien ne garantit donc les droits à l’IVG, à la contraception et au divorce, pourtant loin d’être acquis pour de nombreuses Européennes. Cela est d’autant plus inquiétant que l’article I-52 institutionnalise un dialogue entre l’Union et les Eglises, qui font pression sur de nombreux états pour s’opposer aux droits des femmes dont l’avortement (Pologne, Portugal, Irlande.).

Aussi, on peut espérer que le " droit à la vie " (article II-62), prévu pour lutter contre la peine de mort, ne sera jamais utilisé contre l’IVG.

Tout de même, moi ça me gêne une constitution qui prône le "Droit à la vie" (II, 62) et pas le droit à l’avortement ? Le "droit de se marier" (II, 69) et pas le droit de divorcer ?

Je pense à ces femmes d’Amérique du sud, à celles, qui, avec un regard embué m’ont parlé de notre chance à nous, d’avoir gagné ces combats, qui donnent aux femmes le droit de posséder leur corps, et qui offre en dernier recours la possibilité d’avorter dans des conditions légales qui offrent un minimum de soutien, d’hygiène, de sécurité. En Argentine, chaque année, malgré l’interdiction et le risque pénal (comme quoi interdire ne sert à rien), Il se réalise un avortement clandestin pour deux accouchements. Ce qui donne les chiffres de 1 000 avortements par jour et 400 000 par an et deux femmes meurent par jour d’avortements mal réalisés.


Aux armes citoyens, etc... etc... On connaît la chanson.

Chaque jour dans le journal bolivien, est fait référence à la Guerre du Pacifique, (Chili contre Bolivie et Pérou en 1879) qui priva la Bolivie d’un accès à la mer ; récemment une tension entre le Venezuela et la Colombie a rappelé l’instabilité géopolitique régionale ; le Pérou et l’Equateur se détestent depuis le conflit des années 90.

Parfois, j’ai raconté par ici, cette belle histoire, de deux pays, qui se firent la guerre, trois fois en moins d’un siècle et puis qui s’assirent à la même table pour rêver et réaliser un continent où plus jamais une guerre ne serait possible ; vous savez l’Allemagne, la France, ces moteurs européens.

Alors on en est où ? La constitution propose une Europe encore plus militarisée puisque « les états membres s’engagent à améliorer progressivement leurs capacités militaires » (article I-41) et alliée aux Etats-Unis car la politique de défense européenne « respecte les obligations découlant du traité de l’atlantique nord ». Elle est où cette indépendance européenne, ce discours qui parfois s’oppose au discours états-unien.

Et puis il y a l’article III.131 « Les Etats se consultent en vue de prendre en commun les dispositions nécessaires pour éviter que le fonctionnement du marché intérieur ne soit affecté par les mesures qu’un Etat membre peut être appelé à prendre en cas de troubles intérieurs graves affectant l’ordre public, en cas de guerre ou de tension internationale grave constituant une menace de guerre, ou pour faire face aux engagements contractés par lui en vue du maintien de la paix et de la sécurité internationale. » On croit rêver ! : en cas de guerre, si les Etats se consultent, ce n’est donc pas pour éviter la guerre, mais pour maintenir la concurrence libre et non faussée, le marché intérieur.


OPA sur nos libertés

Dans ce traité, la liberté de concurrence économique prime sur nos libertés individuelles et collectives de citoyen-ne-s du monde.

L’article II-66 dispose que « Toute personne a droit à la liberté », mais la déclaration annexée l’exclut « s’il s’agit de la détention régulière d’une personne susceptible de propager une maladie contagieuse, d’un aliéné, d’un alcoolique, d’un toxicomane ou d’un vagabond [...] d’une personne pour l’empêcher de pénétrer irrégulièrement dans le territoire ». C’est le projet « forteresse » d’une Europe qui criminalise la pauvreté et suspecte la différence. Obsédée par le terrorisme (art I-43) elle accroît la coopération judiciaire et policière contre l’immigration (art III-265 à 277) et exclu de la citoyenneté les résidents étrangers non ressortissants de pays membres.


Une campagne sans débat ?

Où est le débat quand, entre le 1er janvier et le 31 mars 2005, toutes émissions confondues, 71 % des intervenants étaient favorables au "OUI" et quand, dans les journaux télévisés, les défenseurs de la constitution accaparaient 73 % du temps de parole ? Où est le débat quand le CSA n’accorde qu’un tiers du temps de parole aux partisans du "NON" ?

Où est le débat quand les vedettes médiatiques ou des patrons de presse prennent ouvertement position pour le "OUI" ?

Où est le débat quand la quasi totalité des titres de la presse écrite font campagne pour le "OUI" (Le Monde, Libération, Le Point, Le Nouvel Observateur, Paris Match, etc.).

Où est le débat quand deux amis, sélectionnés et convoqués pour poser des questions à Chirac, lors de la Chirac Academy sur TFI en avril dernier, reçoivent au dernier moment un appel téléphonique pour les éconduire pour des raisons divergentes... ah oui ils militent à ATTAC ou à la LCR ; Vive les renseignements généraux au service du groupe Bouygues-TF1 pour empêcher le débat démocratique....... ; ça fait peur ! ! ! ! !


Pour terminer (si, si) résumons :

VOTER NON, qu’est ce que cela veut dire.

Ne nous laissons pas impressionner par les arguments infantiles de l’image des français rétrogrades. Au contraire, Voter NON, c’est voter pour une véritable progression de l’Europe. Le référendum est une arme qu’il faut utiliser : les gouvernements le savent bien, c’est la seule manière de donner un semblant de légitimité à cette Constitution dont l’élaboration a bafoué les règles démocratiques fondamentales, sans parler de la régression démocratique et sociale qu’implique son contenu.

Voter NON signifiera la réaffirmation qu’une autre politique est possible, et ce ne sont pas les propositions qui manquent : l’annulation de la dette du tiers monde, la taxation des flux financiers, un accès gratuit pour tou-te-s à un ensemble de biens et services essentiels, la souveraineté alimentaire, la remise en cause du productivisme et de la consommation compulsive qu’alimente la publicité, le droit des individus à la différence et à l’égalité, la démocratie participative, le droit des communautés à l’auto-organisation et des peuples à l’autodétermination, la fin des occupations impériales.

Oublions cette rhétorique qui consiste à faire passer pour nécessaire, c’est-à-dire ce qui ne saurait être autrement, ce qui en vérité relève d’un choix délibéré, qui par définition pourrait donc être différent.

Et à ceux qui disent que voter NON c’est voter comme les extrêmes, c’est voter comme le F.N, je rappelle que, en Autriche, Mr Haider appelle à voter OUI .... les racistes et xénophobes sont dans les deux camps ...


VOTER OUI ou OUI

Voter pour cette Constitution nous engage donc pour les décennies à venir de façon irrémédiable. Voter pour, c’est donc choisir d’adhérer à ce qu’elle énonce, c’est que vous êtes d’accord avec cela :

Vous voulez :
— que les capitaux et les marchandises aient autant sinon plus de liberté que les humains ? (art. I-2)

— que la liberté du travail soit une valeur de l’Europe mais pas le droit au travail, ni le droit du travail ? (art. II-75)

— que la création d’un marché libre soit un objectif de l’Europe mais pas le plein emploi sauf s’il ne « fausse « pas la concurrence ?

— que la première chose à sauver en cas de crise sociale ou de guerre, ce soit « le fonctionnement du marché » ? (art.III-131)

— qu’un pays en récession soit pénalisé une deuxième fois par une sanction financière imposée par ceux qui sont plus forts ? (art.IIII-184)

— que le moins disant fiscal se généralise dans toute l’Europe, car il faut baisser les allocations chômage et les impôts des riches ? (art.III-171)

— que les droits sociaux soient abandonnés à la « nécessité de maintenir la compétitivité » ? (art. III-209)

— que toute harmonisation des rémunérations, du droit d’association, du droit de grève, soit exclue ? (art . III-210)

— qu’une entreprise de services ne soit soumise qu’à la législation de son pays d’origine en matière de droit du travail, de normes environnementales ou de protection des consommateurs ? (directive BOLKESTEIN)

— que la Constitution ne comporte pas une seule fois les mots « services publics » ?

— que tous les services soient concernés par la mise en concurrence et la libéralisation ? (art. III-145)

— que l’éducation, la santé et les services liés à l’environnement soient les prochaines cibles de la privatisation ? (accords AGCS)

— que les transports, les télécommunications et l’énergie soient libéralisés ? (art. III 246 et III-256)

— que la moitié des bureaux de poste soit fermés ? (art. III-148)

— que toute aide aux services qui subsisteraient encore soit interdite ? (art. III-167)

— que la Constitution soit une photocopie de l’AGCS qui prévoit de tout libéraliser « notamment l’éducation, la santé et les services liés à l’environnement » (dixit la Banque mondiale) ? (art. III-145 à III-147 et III-166 et III-167)

— qu’une Constitution détermine les politiques à suivre ? (titre III en entier)
—  que ces politiques soient exclusivement et définitivement libérales ? (art. III-177)

-que le principe de la laïcité soit absent de la Constitution ? (art.I-51)

— que la défense de l’Europe et ses interventions extérieures soient inféodées à l’OTAN ? (art.I-41)

— Que rien ne bloque le fait que soit un jour rendu illégal l’avortement ? (art.III-124)

— que le droit de se marier et de créer une famille soit reconnu mais pas celui de divorcer ? (art.II-69)

— que, en protégeant les paradis fiscaux européens, l’Europe favorise le blanchiment de l’argent sale de la drogue, des mafias, de la prostitution, du terrorisme ? (art. IV - 440-6)

CONCLUSION (enfin !)

Loin d’apporter le moindre progrès par rapport aux traités existants, le projet de Constitution instaure de manière irréversible le libéralisme comme valeur fondatrice de l’Union.

Il est donc clair que ce projet de constitution outrepasse de loin la légitimité et la fonction juridique d’une constitution transformant en principes universels ce qui appartient au domaine variable et controversé de la législature, soumise à la règle légitime de la démocratie.

Alors, votons en fonction de nos idées et non de nos attaches politiques, prenons le temps de lire, de comprendre, de débattre. Il en va de l’avenir.

Pour terminer une citation :

« Tant que l’homme est plongé dans la situation historique, il lui arrive de ne même pas concevoir les défauts et les manques d’une organisation politique ou économique déterminée, non comme on dit sottement parce qu’il en « a l’habitude », mais parce qu’il la saisit dans sa plénitude d’être et qu’il ne peut même pas imaginer qu’il puisse en être autrement. Car il faut ici inverser l’opinion générale et convenir de ce que ce n’est pas la dureté d’une situation ou les souffrances qu’elle impose qui sont motifs pour qu’on conçoive un autre état de choses où il en irait mieux pour tout le monde ; au contraire, c’est à partir du jour où l’on peut concevoir un autre état de choses qu’une lumière neuve tombe sur nos peines et sur nos souffrances et que nous décidons qu’elles sont insupportables » Sartre. L’être et le néant .

Hésitez pas à envoyer vos remarques à mon mail perso, militant ou à verslesud a free.fr

Long texte réalisé avec les lectures et écritures de : Collectif du pays de Rennes pour Une autre Europe, http://etienne.chouard.free.fr, textes de Jean Gadrey, Professeur émérite d’économie à l’Université Lille I, textes de Virginia Rajkumar, www.intergalactique.org et le livre d’Attac sur la Constitution Libéralisation des transports, dumping social et atteintes à l’environnement .

Amérique du Sud

Un premier pied posé en Amérique du sud (Brésil) il y a trois ans et depuis l’attente d’y retourner, mais pas que pour quelques semaines. Voilà, maintenant la route du sud est ouverte pour la marche, le vélo mais aussi pour tenter de comprendre les réalités sociales...

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